Evaluer : pour quoi faire ?

La Synthèse du Service d’Appui Pédagogique

Vaste sujet que l’évaluation des apprentissages! Dans cette synthèse, nous vous présentons différents aspects de l’évaluation :
  • son objectif principal,
  • les grandes familles d’évaluation,
  • les moments d’évaluation,
  • une procédure de construction d’évaluation,
  • un moyen de réduire la subjectivité de la correction.
Bonne lecture!

Objectif(s) de l’évaluation des apprentissages

Pour la plupart des enseignants, évaluer consiste principalement en l’attribution d’une note, d’une valeur, ayant pour objet la détermination des capacités d’un individu (Henuset, Kemeulen et Vanden Bemden, 2006). Daele et Berthiaume (2011), abondent en ce sens en proposant la définition suivante :
Le processus d’évaluation des apprentissages a pour but d’obtenir de la part des étudiant-e-s une trace ou un témoignage qu’ils/elles ont réalisé les apprentissages ou développé les compétences visés par le cours (ou séminaire, TP, etc.). Daele et Berthiaume, 2011, p.1
Toute évaluation vise donc à dresser un bilan sur les connaissances ou compétences de l’élève (Cellule prac-tice ULB, nd.), et si le processus d’évaluation permet d’obtenir une trace des apprentissages réalisés, c’est la façon dont ces résultats seront exploités qui modifiera la finalité spécifique de l’évaluation. Ainsi l’évaluation peut permettre de (Henuset, Kemeulen et Vanden Bemden, 2006) :
  • Réguler,
  • Certifier,
  • Orienter.
Nous n’aborderons pas dans cet article l’évaluation à visée d’orientation, nous nous concentrerons donc sur les évaluations permettant de certifier ou de réguler les apprentissages.

Certifier ou réguler : deux grandes familles d’évaluation

L’évaluation certificative

L’évaluation ayant pour objet de certifier les apprentissages porte l’appellation d’évaluation certificative. Ce type d’évaluation délivre en fait une sanction officielle, généralement matérialisée par un document officiel: un diplôme, un certificat, un bulletin de notes par exemple (De Peretti et al., 1993 ; Rey et al., 2003). On la retrouve également sous le nom d’évaluation sommative, et ce type d’évaluation comporte les caractéristiques suivantes (Daele et Berthiaume, 2011):
  • Elle évalue la « somme des apprentissages »,
  • Elle intervient à la fin d’un apprentissage,
  • Elle amène une prise de décision quant à la réussite,
  • Elle est accompagnée d’une note chiffrée ou alphanumérique.
Dans notre système scolaire, l’évaluation certificative intervient généralement en fin d’apprentissage (en fin de quadrimestre) et est représentée par les conseils de classe. On parle généralement dans ce cas d’évaluation cumulative : la somme des résultats obtenus lors du travail continu et les résultats des examens permettent d’arrêter une décision (Henuset, et al. 2006).

L’évaluation formative

L’évaluation formative, quant à elle, a pour objet la régulation de l’apprentissage de l’étudiant. Elle comporte généralement les caractéristiques suivantes (Daele et Berthiaume, 2011) :
  • Elle vise à donner des indications quant au niveau de maitrise d’un apprentissage en cours,
  • elle est suivie d’un feedback oral ou écrit,
  • elle n’est pas notée, ou la note donnée intervient dans une très faible proportion de la note finale.
Suite à une évaluation formative, il s’agit donc de mettre en œuvre une stratégie de régulation. La régulation proposée peut porter sur les progrès des étudiants, mais également sur la pédagogie: sur la situation d’apprentissage ou sur le rythme d’enseignement (Scallon, 1988). Un autre intérêt principal de l’évaluation formative est qu’elle va permettre d’informer l’étudiant sur sa progression. Henuset, et al. (2006), distinguent trois types d’évaluations formatives :
  • l’hétéro-évaluation, lorsque l’évaluation formative est menée par l’enseignant,
  • la co-évaluation, lorsque l’évaluation est menée par l’étudiant à l’aide d’un pair ou d’un référentiel,
  • l’auto-évaluation, lorsque l’élève porte un jugement sur sa production.
Dans leur cours de didactique générale à l’UMons, De Lièvre et Temperman (2010), distinguent l’évaluation formative, qu’ils caractérisent comme une démarche de l’enseignant, de l’évaluation formatrice, lorsque l’apprenant est responsable de la régulation. Ce concept d’évaluation formatrice favoriseraient l’auto-évaluation, et ainsi l’engagement et l’autonomie de l’apprenant (Nunziati, 1988).

D’autres types d’évaluations

Il existe d’autres types/modalités d’évaluation. Ainsi, l’évaluation ipsative apprécie les progrès individuels d’un apprenant en comparant ses résultat entre un pré-test et un post-test. L’évaluation ipsative permet ainsi le calcul des gains et la mesure de l’effet d’apprentissage. Enfin, nous clôturons par l’évaluation normative, qui consiste à comparer la performance des apprenants à la performances d’un groupe de référence est à proscrire. Non seulement, elle est peu pertinente et toute relative, car elle est fonction de la performance du groupe de comparaison, mais elle est également sensible à un biais appelé la « loi de Posthumus » (1947). Cette théorie avance que l’enseignant va tendre à ajuster son niveau d’enseignement ou d’appréciation de la performance des étudiants afin de conserver la même courbe de résultats d’année en année (De Lièvre et Temperman, 2010).

Quand faut-il évaluer ?

Le moment où l’on mène une évaluation sera différent selon ce que l’on veut évaluer. Ainsi, il est possible de mener des évaluations avant, pendant et après l’apprentissage selon les objectifs de l’évaluation.

Avant l’apprentissage

Lorsque l’on évalue avant l’apprentissage, c’est que l’on souhaite mettre en place une évaluation diagnostique, permettant de récolter des informations sur les représentations d’un savoir ou sur la maitrise des savoirs indispensables afin de mener à bien une séquence d’apprentissage (De Lièvre et Temperman, 2010). Faire émerger les représentations, ou conceptions préalables, que les étudiants ont d’un savoir que l’on souhaite enseigner est intéressant, car ces représentations peuvent gêner l’apprentissage si elles sont erronées (Giordan, 1998). Il est important de préciser aux étudiants que leurs réponses ne seront pas jugées, afin d’obtenir une expression riche. Cette démarche semble particulièrement appropriée dans les cours scientifiques (De Lièvre et Temperman, 2010). Si l’on souhaite évaluer la maitrise de savoirs indispensables par les étudiants, il est conseillé de leur faire passer un test de pré-requis, qui permettra de vérifier si les apprenants maitrisent les bases nécessaires afin de mener à bien l’apprentissage à venir, ou si une remédiation doit être mise en place (De Lièvre et Temperman, 2010).

Pendant l’apprentissage

Les évaluations menées pendant l’apprentissage sont généralement des évaluations formatives.

Après l’apprentissage

Les évaluations menées après l’apprentissage sont généralement des évaluations certificatives.

Les trois phases du processus d’évaluation (Daele et Berthiaume, 2011)

Daele et Berthiaume (2011) avancent que le processus d’évaluation peut être présenté selon trois phases successives, synthétisées à l’aide du schéma suivant:
Selon les auteurs :
« Ces trois phases pourraient être apparentées à un processus de recherche qualitative au cours duquel des questions de recherche sont posées (phase de clarification), des instruments de collecte de données sont mis en œuvre (phase d’observation) puis des méthodes d’analyse qualitative sont utilisées pour répondre aux questions de recherche (phase d’interprétation). » Daele et Berthiaume, 2011, p.2

Phase de clarification

Lors de cette phase, il s’agit de définir ce que l’on veut évaluer. Définir les apprentissages ciblés par l’évaluation permet de s’assurer de sa validité, en focalisant son attention sur les objectifs du cours

Phase d’observation

Lors de cette phase, il s’agit de choisir et mettre en œuvre une stratégie d’évaluation adéquate. Il faut décider du moment de l’évaluation, nous avons vu précédemment l’importance de ce point (Quand évaluer?), mais il faut également définir l’objet de l’évaluation, et par analogie, la production attendue. Les différents objets d’évaluation peuvent être :
  • un produit fini (on évalue par exemple la qualité d’un texte produit par l’étudiant),
  • un processus de pensée (on évalue la qualité d’une argumentation),
  • une performance ponctuelle ( on évalue une prestation lors d’un examen oral),
  • des progrès réalisés sur une certaine période de temps ( on évalue par exemple un portfolio réalisé sur une année scolaire complète).
Il faut également choisir une stratégie d’évaluation, chaque stratégie permettant d’évaluer des aspects différents et comportant des points positifs et des points négatifs.

Phase d’interprétation

Lors de cette phase, il s’agit d’analyser la production des étudiants et d’attribuer une valeur aux traces d’apprentissage. Plusieurs choses sont à déterminer pour la mise en oeuvre de cette phase du processus.
  • La référence : par rapport à quoi sont évalués les apprentissages ? un critère absolu de réussite ? La moyenne du groupe ?
  • La personne qui évalue : l’enseignant ? un jury externe ? l’étudiant lui même ou ses pairs ?
Suivre cette procédure pour créer une évaluation permet de tendre vers une objectivité procédurale, et ainsi d’atténuer les effets de la subjectivité en standardisant la manière dont l’évaluation est appliquée.

Conseil pratique : atténuer la subjectivité à l’aide de l’évaluation critériée

Deux outils permettent de rendre l’évaluation la plus objective possible : les critères d’évaluation et les niveaux de performance attendus. En combinant ces deux outils, on obtient une grille d’évaluation critériée. Etablir des critères d’évaluation directement liés aux objectifs pédagogiques permet de clarifier ce qui est évalué. Les critères doivent fournir une description précise de ce qui doit être maitrisé par l’étudiant, et ils permettent de faire abstraction du contexte de l’évaluation (par exemple, la façon dont un étudiant est vêtu). Identifier les niveaux (ou indicateurs) de performance permet de clarifier les niveaux de compétence. On distingue en générale deux ou trois niveaux de compétence qui peuvent être quantitativement ou qualitativement différents :
  • Deux niveaux : succès ou échec
  • Trois niveaux qualitatifs : Excellent / acceptable / inacceptable
  • Trois niveaux quantitatifs : Maitrise complète / maitrise partielle / maitrise insuffisante.

Pour terminer … Quelques points d’attention

  • L’évaluation est complexe et demande beaucoup d’attention lors des trois phases du processus proposé par Daele et Berthiaume (2011).
  • L’évaluation est un processus qui prend beaucoup de temps : de sa conception, à la correction et à la rétroaction (feedback aux étudiants), mettre en place une évaluation de qualité est chronophage… Mais indispensable!
  • La subjectivité de l’évaluation peut être atténuée en respectant une certaine procédure de création et en utilisant des grilles critériées de correction.

Bibliographie

  • CTE ULB (n.d.). Evaluation formative et évaluation certificative. Les fiches-outils de la cellule PRAC-TICE. Université Libre de Bruxelles.
  • Daele, A., Berthiaume, D. (2011). Choisir ses stratégies d’évaluation. En ligne, dernière consultation le 08/12/2020 : https://www.unil.ch/files/live//sites/cse/files/shared/brochures/memento_m4_strategies_evaluation_V3_13fevrier2011.pdf
  • De Lièvre, B., Temperman, G. (2010). Didactique générale. Syllabus, Université de Mons
  • Henuset, D., Keymeulen, R., & Vanden Bemden, P. (2006). Guide pratique du prof. Enseigner avec plaisir et compétence(s). Wolters Kluwer.

Pour aller plus loin

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L’évaluation étant un sujet particulièrement important dans l’enseignement supérieur, le Service d’Appui Pédagogique propose donc plusieurs formations. Cliquez sur l’intitulé de la formation pour ouvrir la page eCampus concernée dans un nouvel onglet :

Ressources supplémentaires

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